La ZFE du Grand Lyon : un effort louable mais insuffisant
Samedi 5 mars – Dans quelques jours, la Métropole du Grand Lyon rendra son verdict sur l’évolution de la Zone à Faibles Emissions (ZFE). Pour la coalition La Rue Est A Nous Lyon (LREAN Lyon)[1], cet outil, imposé par la loi, représente un bon début dans la lutte contre la pollution mais reste largement imparfait.
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Pour Lolita Boucher, porte-parole Alternatiba ANV Rhône, « il faut être plus ambitieux dans la politique de transition des mobilités, et développer massivement les alternatives durables : les usagers suivront. Il est primordial de réduire drastiquement l’utilisation de la voiture sur le territoire. C’est ce qui permettra de vivre dans une métropole plus saine, plus respectueuse du climat et plus vivable pour toutes et tous ».
La ZFE est imparfaite d’abord parce qu’elle est fondée uniquement sur la vignette Crit’Air. Une vignette qui est attribuée en fonction de la seule année de fabrication sans considération du poids du véhicule. Or, plus un véhicule est lourd, plus il émet du CO2 et plus il contribue au réchauffement climatique.
Imparfaite également parce qu’elle risque de pénaliser les habitants les plus précaires. Ceux qui remboursent encore le crédit de leur vieille voiture, et qui ne sont, au contraire, pas nécessairement ceux qui font le plus de kilomètres.
Imparfaite enfin, parce qu’elle ne combat pas la prédominance de la voiture en ville. Aujourd’hui, 80 % de la voirie est accaparée par la voiture, alors que les modes doux, la marche, le vélo doivent se contenter des 20 % restants.
En Auvergne-Rhône-Alpes la pollution atmosphérique est responsable de près de 6000 morts prématurées par an. Lyon a connu 25 pics de pollution dans la seule année 2021. Contre cela, la ZFE seule est insuffisante. Tout d’abord, elle doit être accompagnée par le renforcement du réseau TCL, afin d’offrir des alternatives en transports en commun plus efficaces. Pour LREAN Lyon, aucun point de la Métropole ne doit être éloigné d’un autre de plus de 60 minutes en transport collectif.
Les modes actifs, marche et vélo, doivent également être développés, en créant des cheminements plus sûrs. Le futur réseau express des Voies lyonnaises est un signal fort dans ce sens. Mais la pratique du vélo doit aussi être encouragée dès le plus jeune âge, notamment dans les écoles. De plus, LREAN Lyon demande la création de zones piétonnes dans tous les quartiers de Lyon et dans toutes les communes de la Métropole.
L’objectif doit être de faire passer la part de l’automobile dans les déplacements métropolitains sous la barre des 30 % en 2030 (contre 41 % actuellement). Déjà aujourd’hui, d’autres villes européennes font bien mieux que cela, comme Amsterdam ou Copenhague où cette part ne dépasse pas 25 %.
De plus, LREAN Lyon demande qu’une majoration significative du tarif de stationnement soit mise en place pour les SUV, c’est-à-dire les véhicules les plus lourds, les plus émetteurs de gaz à effet de serre, les plus encombrants et les plus dangereux (conduire un SUV augmente de 224 % le risque de causer un accident mortel[2]). Cette mesure, qui commence à se répandre outre-rhin (par exemple à Tübingen), aura pour but d’endiguer l’envahissement de nos villes par ces engins inutilement surdimensionnés.
Enfin, la sortie du diesel en 2026 dans toute la Métropole est impérative. Elle doit être suivie par une interdiction de la voiture thermique dès 2030 à Lyon et Villeurbanne où les alternatives en transport en commun sont déjà nombreuses.
En revanche, tout cela ne sera possible qu’avec des mesures d’accompagnement fortes à l’attention des personnes les plus précaires. Ces aides ne doivent pas se résumer à des bons d’achat pour une nouvelle voiture. Elles doivent également inciter à la pratique du vélo, de l’auto-partage et des transports collectifs pour celles et ceux qui peuvent y recourir. Enfin, des dérogations doivent être proposées, à titre transitoire, aux habitants qui ne peuvent pas se passer de leur voiture, parce qu’ils travaillent en horaires décalés par exemple, ou bien à ceux qui ne roulent qu’occasionnellement.
“La sortie du diesel est nécessaire pour améliorer la qualité de l’air dans la métropole. Il est également indispensable de prévoir des aides pour accompagner les ménages, afin de ne laisser personne sur le bord de la route. La transition vers des mobilités alternatives peut et doit bénéficier à tout le monde”, estime Clément Drognat Landré, coordinateur LREAN Lyon.
En résumé, c’est à condition d’être complétée par toutes ces mesures que la ZFE deviendra un outil juste et cohérent afin de mettre fin à la prédominance de la voiture, apaiser nos villes et rendre l’air grand-lyonnais enfin respirable !
[1] La coalition La Rue Est A Nous Lyon regroupe Alternatiba ANV Rhône, Clean Cities Campaign, le Collectif contre la Pollution à l’école Michel Servet, Greenpeace et La Ville à Vélo – Lyon
[2] https://nationalpost.com/news/canada/larger-vehicles-may-make-canadians-feel-safe-on-the-road-but-heavier-cars-are-proven-to-cause-more-fatal-collisions
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Crédit photo : Bastien Doudaine